La perception des risques
Dans ce nouveau rapport, l’Académie des technologies, dont la devise est « Pour un progrès raisonné, choisi, partagé », s’est penchée sur la perception des risques induits par toute innovation. Prenant acte des controverses que certaines applications des sciences ou certaines innovations technologiques suscitent, ce texte pose la question politique du projet de la cité, de ses fins : que voulons-nous faire collectivement des savoirs et des pouvoirs que la science et la technologie nous donnent ?
Au travers de toutes les controverses que certaines applications des sciences ou certaines innovations technologiques suscitent, les avancées de la science et surtout de la technique ne sont plus systématiquement perçues comme des facteurs de progrès.
Plantes OGM, antennes des téléphones mobiles, nanotechnologies… L’expertise scientifique est désormais suspectée d’être partisane, soumise à des conflits d’intérêts… Les catastrophes chimiques, nucléaires, écologiques et sanitaires qui, au cours du siècle précédent, ont porté un coup sévère au prestige des sciences et des technologies, ne sont bien sûr pas pour rien dans la défiance dont celles-ci sont aujourd’hui l’objet.
Dans ce nouveau contexte, les scientifiques – les ingénieurs comme les chercheurs – sont sommés d’éviter à tout prix non seulement la catastrophe, mais également l’ombre de toute catastrophe possible. Et c’est ainsi que le discours sur la catastrophe en vient à acquérir un pouvoir réel, en même temps qu’une véritable légitimité médiatique, même si la catastrophe en question demeure purement fictionnelle.
Or, lorsque certaines solutions thérapeutiques, énergétiques ou agronomiques sont empêchées par l’expression de ces craintes, qui est en mesure d’évaluer précisément les divers dommages qu’occasionnera cette interruption de « l’arborescence technologique » ? Le désir de précaution est certes légitime, à condition qu’il ne s’amplifie pas au point de « tuer dans l’œuf » des sources d’espoir, concluent les auteurs du rapport, qui appellent à prendre en compte aussi, dans toute décision politique, le coût de l’inaction.
Les auteurs
Gérald BRONNER – sociologue et romancier, Gérald BRONNER est professeur à l’Université Paris Diderot où il occupe le poste de directeur adjoint dans le laboratoire interdisciplinaire des énergies de demain. Il a été maître de conférences à l’Université de Nancy en 1998 puis à la Sorbonne où il a codirigé le Centre d’études sociologiques de la Sorbonne (CESS).
Ses travaux portent sur les croyances collectives, et plus particulièrement sur les phénomènes de cognitions sociales. Il a publié en 2013 La démocratie des crédules, livre pour lequel il a reçu le Prix de la revue des deux mondes, le Prix Procope des Lumières, le prix Sophie Barluet et un prix de l’Académie des Sciences Morales et Politiques. Il est membre de l’Académie des technologies.
Étienne KLEIN, ancien élève de l’École centrale de Paris, titulaire d’un DEA de physique théorique et un doctorat en philosophie des sciences, est directeur de recherche au CEA et dirige actuellement le Laboratoire des Recherches sur les Sciences de la Matière. Etienne Klein a enseigné la physique quantique et la physique des particules à l’École Centrale Paris, participé à divers grands projets du CEA et du CERN (mise au point du procédé de séparation isotopique par laser.
Il s’intéresse désormais à la philosophie des sciences et plus généralement aux défis posés à nos sociétés par le développement des sciences et des technologies.
Il est membre de l’Académie des technologies est membre du Conseil scientifique de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).