Communiqué des commissions « Énergie et changement climatique » et «Environnement » de l’Académie des technologies
L’autonomie énergétique est un objectif majeur pour la France et l’Europe. Stratégiquement, notre pays peut-il renoncer à la recherche de nouvelles ressources énergétiques dans son sol ? La demande énergétique ne baissera pas significativement à court terme. Le développement de l’éolien et du solaire, en plus de son impact sur la hausse des prix de l’électricité, exigera plus d’énergie de support rapide lors des variations soudaines de vent ou d’ensoleillement. L’hydraulique n’y suffira plus et les turbines à gaz seront utilisées même si elles sont émettrices de CO2. Le gaz est incontestablement une source d’ajustement et de flexibilité du réseau électrique et, s’il provient de notre sol, offre une capacité à négocier sur les marchés de l’énergie.
Selon l’Agence internationale de l’énergie, le territoire français recèlerait 5100 milliards de m3 d’hydrocarbures de roche mère, soit un siècle de consommation nationale de gaz, au rythme actuel de 51 milliards de m3/an, et une économie de 1 000 milliards d’euros par rapport à l’importation de cette quantité de gaz de l’étranger.
Il est clair que les dommages inacceptables causés à l’environnement ne doivent pas se produire en France. Ceux constatés, par exemple aux Etats-Unis, sont-ils la conséquence de comportements industriels irresponsables voire délictueux ? Ces pollutions sont-elles évitables ? La réponse à ces questions ne doit pas être éludée, mais au contraire recherchée dans une transparence absolue.
En matière d’impact écologique des technologies d’exploitation, cinq domaines critiques majeurs ont été identifiés: risque de mise en péril des aquifères, dangers attribués à la fracturation hydraulique, quantité d’eau consommée, dangerosité de certains produits chimiques utilisés, impact paysager.
En ce qui concerne la fracturation hydraulique, c’est une technique utilisée depuis plusieurs décennies pour la stimulation des puits pétroliers. En Ile-de-France, près de 2 000 forages étanches traversent les aquifères. Quant aux additifs chimiques, ils doivent être soumis à un contrôle réglementaire strict.
Le concept même de développement durable, qui conduit à prendre en compte les aspirations de l’ensemble des parties prenantes (protecteurs de l’environnement, consommateurs, etc.) et la juste application du principe de précaution ne conduisent pas à l’inaction mais au contraire à engager des projets de recherche et d’expérimentation qui permettront à la France de connaître ses réserves, le coût d’exploitation, les risques pour l’environnement, la possibilité de les maitriser et finalement de prendre à bon escient la décision d’exploiter ou non tel ou tel gisement d’hydrocarbures (liquides ou gazeux) de roche mère.
L’Académie des technologies préconise donc une démarche volontariste de recherche -démonstration portant sur l’existence des ressources et prenant en compte l’acceptabilité écologique des technologies à tester et à mettre en œuvre: mise en place de puits expérimentaux instrumentés, création d’un comité de vigilance issu de la société civile, programme de recherche sur les méthodes d’exploitation (notamment la fracturation hydraulique) des hydrocarbures de roche mère s’appuyant sur les alliances ANCRE (alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie) et ALLEnvi (alliance Alimentation, Eau, Climat, Territoire).
Lire aussi le dossier publié en partenariat avec le Figaro : La France doit-elle exploiter ses réserves de gaz de schiste ? Le figaro, 17/2/12
Bernard Tardieu, ingénieur, membre de l’Académie des technologies : l’augmentation de la production éolienne et solaire va augmenter les besoins de gaz en France.
Lire aussi :Peut-on extraire proprement le gaz de schiste ?
Pour Michel Combarnous, physicien, membre fondateur de l’Académie des technologies, les progrès technologiques ont diminué l’impact de l’extraction sur l’environnement.
Le système d’extraction du gaz de schiste (infographie)