FAIRE DE LA FRANCE UNE ÉCONOMIE DE RUPTURE TECHNOLOGIQUE
Soutenir les marchés émergents à forts enjeux de compétitivité
Le Ministre de l’Économie et des Finances conjointement à la Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation ont confié la mission à un collège d’experts construit autour du Conseil de l’innovation d’établir une stratégie ambitieuse et sélective pour déclencher une nouvelle dynamique industrielle et entrepreneuriale sur des marchés émergents.
La construction de stratégies d’accélération pour ces marchés, et la sélection de marchés prioritaires sur lesquels concentrer l’action publique, seront un élément clef du pacte productif annoncé par le Président de la République au mois d’avril 2019.
Devenir une économie de rupture technologique nécessite de faire des choix de secteurs prioritaires, sur lesquels focaliser des soutiens massifs à l’innovation, au-delà des aides transverses à l’ensemble des secteurs. Une telle intervention ciblée, orientée sur le long terme, doit permettre d’anticiper, de préparer et d’encourager les grandes transitions (numérique, environnementale ou démographique) qui vont venir remodeler notre société à horizon 2030, tout en garantissant notre souveraineté nationale.
Afin de s’ancrer au cœur des attentes de nos concitoyens, notre méthode a pris pour point de départ les enjeux sociétaux majeurs auxquels nous devons faire face pour les décennies à venir. Deux raisons principales président à ce choix : d’une part, les défis sociétaux nécessitent intrinsèquement une intervention de l’Etat pour pallier les défaillances de marché et exercer une fonction d’accélérateur de la transformation de l’économie en réponse à ces défis ; d’autre part, ils renvoient au développement de nouvelles solutions innovantes, créatrices de richesse et d’emplois.
Notre démarche s’est ainsi structurée autour de quatre enjeux sociétaux fondamentaux :
– favoriser une alimentation saine et durable et contribuer à la souveraineté alimentaire mondiale ;
– préserver et développer la santé et le bien-être de nos citoyens, notamment en ce qui concerne l’accompagnement du vieillissement de la population, le traitement des maladies chroniques et rares, et la réponse au problème des déserts médicaux ;
– protéger l’environnement et assurer notre transition écologique et énergétique, en particulier vers une mobilité sans énergie fossile ;
– assurer notre souveraineté dans le numérique, qui est au cœur de la protection et la sécurisation de nos vies privées sur internet et du développement de l’économie et de l’éducation.
Afin d’identifier les marchés émergents associés, l’ensemble des parties prenantes a été consulté pour construire une approche commune. Ainsi, les écosystèmes d’innovation (pôles de compétitivité, SATT, incubateurs, IRT/ITE, réseaux French Tech), start-ups, représentants de la recherche publique, Ministères, opérateurs publics, Régions et l’Académie des Technologies ont été mobilisés et nous les en remercions vivement.
C’est sur cette base riche que nous avons identifié 22 marchés émergents, dont 10 prioritaires, sur lesquels la France a le potentiel pour jouer un rôle de leader à l’échelle mondiale et appelant une concentration des moyens.
A ces 10 marchés prioritaires s’ajoutent 12 autres marchés présentant des enjeux sociétaux et technologiques nécessitant la poursuite des actions de soutien public, voire ultérieurement l’élaboration de stratégies d’accélération.
Au-delà de ce mandat, nos travaux nous ont aussi permis de mettre en évidence plusieurs enjeux transversaux à l’ensemble des marchés.
– En premier lieu, le soutien aux technologies diffusantes (IoT, robotique-cobotique, cloud) constitue un facteur clé de l’accroissement de la performance de nos processus industriels. Caractérisées par un rôle de diffusion dans l’économie, elles permettent d’optimiser les processus, raccourcir les délais et renforcer la sécurité. Si les acteurs français ne sont pas nécessairement bien positionnés sur certaines briques technologiques, l’acculturation des PME et ETI, la possibilité de personnaliser (« customiser ») des technologies existantes est fondamentale pour réinventer et optimiser les processus industriels.
– Deuxièmement, revient le sujet du financement de la croissance des entreprises innovantes. Cette problématique a déjà donné lieu à la mission de Philippe Tibi et aux annonces du Président de la République au mois de septembre 2019. Néanmoins, nous en rappelons l’importance en réaffirmant que la croissance de nos entreprises technologiques passe par un financement suffisamment important et rapide. A défaut de prise en compte de ces éléments, la France demeurera dans un rôle d’incubation d’entreprises innovantes à fort potentiel qui feront l’objet de rachats par les grands groupes mondiaux étrangers.
– Enfin, l’accompagnement de ces transitions nécessite d’agir en profondeur sur les compétences, en adaptant au plus tôt les cursus, en développant les formations au cours de la vie et en promouvant une politique des talents, y compris dans sa dimension internationale.
Au total, notre démarche n’a pas pour prétention de figer le paysage pour les prochaines années. Il s’agit d’un premier socle conjuguant une série de signaux forts justifiant, à côté des aides génériques en place, de renforcer l’accompagnement de certains secteurs soumis à des perspectives de croissance très fortes. La condition d’efficacité d’une telle politique verticale d’accélération est de déverrouiller chaque maillon de la chaine d’innovation conjointement. Notre première recommandation consiste ainsi à mettre en œuvre cette approche « holistique », qui suppose un décloisonnement et une concentration du soutien public.
Comme tout exercice de prospective, et spécialement eu égard à la vitesse des changements en cours, technologiques et économiques, il a vocation à être renouvelé annuellement, afin de veiller à l’apparition de nouveaux marchés prioritaires susceptibles de positionner la France en véritable pays précurseur. Il s’agit là de notre deuxième recommandation à l’issue de nos travaux : structurer et faire perdurer une fonction de prospective stratégique regroupant les principales parties prenantes ayant participé à cette mission.
(source : extraits de la synthèse du rapport Faire de la France une économie de rupture technologique).