TRIMESTRIEL DE L’INTELLIGENCE TECHNOLOGIQUE #2
La photosynthèse permet d’utiliser à la fois l’énergie de la lumière du soleil et le carbone du gaz carbonique CO2 pour élaborer presque toute la matière organique de la biosphère. Ce processus très robuste de plusieurs milliards d’années s’est adapté aux changements de l’environnement au cours des différentes périodes géologiques tout en conservant une grande stabilité dans ses mécanismes de base. Les avancées dans les technologies de la génomique et de l’ingénierie génétique ont conduit récemment à des résultats spectaculaires permettant d’envisager à court terme d’augmenter l’efficacité de la photosynthèse.
Auteurs : Jean-François Morot-Gaudry, Académie d’Agriculture de France et Alain Michel Boudet, Académie des Technologies
Editeur : La fondation de l’Académie des technologies
La photosynthèse est un processus très robuste qui a connu une très grande stabilité au cours de l’histoire de la Terre, en particulier pour les mécanismes de capture et de transformation de l’énergie de la lumière en énergie chimique. Il en est de même de l’enzyme de fixation du carbone, la rubisco. Toutefois, des avancées récentes dans la biologie des systèmes, la génomique et la biologie de synthèse permettent d’envisager des ruptures dans l’optimisation contrôlée des processus photosynthétiques :
– mise au point d’un mécanisme de concentration en CO2 au sein des cellules photosynthétiques pour favoriser la fonction carboxylase de la rubisco et augmenter en conséquence la productivité primaire des plantes d’intérêt agronomique.
– utilisation d’un nouveau cycle métabolique défini par la biologie de synthèse, en particulier introduction à la place de la rubisco de carboxylases plus performantes qui pourraient améliorer la productivité primaire des organismes photosynthétiques et réduire la teneur en CO2 de l’atmosphère.
– action sur les mécanismes naturels de photoprotection pour réduire leurs effets limitant l’efficacité photosynthétique.
Parmi ces nombreux travaux prometteurs, on ignore aujourd’hui lesquels d’entre eux se révèleront profitables et seront susceptibles d’une application agricole et industrielle à grande échelle. Il est clair que les nouvelles biotechnologies offrent l’opportunité d’accélérer l’évolution darwinienne en optimisant selon différentes voies l’efficacité photosynthétique .
Cette accélération vise non pas à l’amélioration des plantes vis à vis de leur stratégie de survie et d’adaptation à l’environnement mais à une adaptation aux besoins d’une utilisation humaine. Le but premier est de produire plus de nutriments pour l’Homme, de réduire la pression foncière pour l’alimentation et donc potentiellement de permettre des usages des sols pour l’énergie (biomasse pour une énergie renouvelable et stockable).
Il faut cependant souligner que ces améliorations potentielles n’ont pas encore été testées par l’épreuve du temps à l’échelle des écosystèmes. D’une part, une homéostasie moléculaire et cellulaire existe dans les mécanismes actuellement fonctionnels, va-t-on la conserver dans les nouveaux systèmes ? D’autre part, les facteurs de l’environnement comme la température mais surtout l’eau et la ressource minérale azotée sont les principaux facteurs limitant de la production de biomasse, ils devront donc être à leur meilleur niveau pour que des améliorations significatives de rendement soient observées dans les conditions du »champ » via de nouvelles capacités de la photosynthèse.
L’agriculture et la bio-économie doivent actuellement répondre aux défis de la sécurité alimentaire, du changement climatique et des transitions agroécologiques et énergétiques. Toutes les contributions scientifiques et techniques doivent ainsi se combiner pour répondre à ces défis y compris celles des biotechnologies « vertes » et du génie génétique qui sont plus particulièrement concernées dans ces études.