Le questionnaire auquel répondent les Femmes de tech est une variante du questionnaire de Proust, ainsi nommé non pas parce que Marcel Proust se serait égaré dans le métro parisien, mais en mémoire d’Emilie du Chatelet, femme de lettres, mathématicienne et physicienne, renommée pour sa traduction des Principia Mathematica de Newton et la diffusion de l’œuvre physique de Leibniz. Elle fût membre de l’Académie des sciences de l’Institut de Bologne. Emilie du Chatelet mena au siècle des Lumières une vie libre et accomplie et publia un discours sur le bonheur.
POURQUOI LA TECH ?
La tech est un formidable terrain de jeu, à la croisée entre l’innovation et l’impact. C’est une motivation constante de repousser les limites de la science en portant des projets qui font du sens.
VOTRE PARCOURS ?
Avec un baccalauréat scientifique, je prépare les concours d’entrée aux écoles d’ingénieurs et rejoins l’Institut d’Optique Graduate School avec une spécialisation en entrepreneuriat dans l’innovation. Je me lance dans la création d’entreprise avec un camarade de promotion et un enseignant-chercheur qui nous donne l’idée de promouvoir l’une de ses inventions. Il s’agit d’une technologie de microscopie directement utilisable sur le vivant, que nous décidons d’exploiter dans un équipement dédié aux dermatologues : pour une meilleure détection des cancers de la peau, la suppression de biopsies inutiles et le suivi de l’efficacité d’un traitement. Je complète en parallèle ma formation, en particulier sur les enjeux marketing et financiers, par un MBA à HEC.
VOTRE PREMIÈRE EXPÉRIENCE PROFESSIONNELLE DANS LA TECH ?
Mon premier stage d’école d’ingénieurs. Je participais au développement d’un outil de visualisation de l’ensemble des retours d’expériences terrain des agents EDF. Cette première expérience m’a donné une première vision du travail en équipe et une évaluation du niveau technique attendu dans le monde industriel.
VOUS FAITES QUOI AUJOURD’HUI ET POURQUOI ?
Aujourd’hui, je suis présidente de la start-up DAMAE Medical qui développe le dispositif deepLive™. Il s’agit d’un dispositif ergonomique constitué d’une sonde manuelle, qui permet au dermatologue, au sein même de son cabinet, d’acquérir des images de l’anomalie cutanée directement sur le patient, par simple contact avec la peau. Le dermatologue a alors accès à de très nombreux critères cellulaires et architecturaux propres à chaque type de cancer cutané. Nous sommes désormais une vingtaine de collaborateurs réunis autour de la vision de révolutionner la prise en charge des cancers de la peau.
VOS ATOUTS POUR CE POSTE ?
La passion, la persévérance et la vision. La passion est à la fois un trait de personnalité mais surtout une chance. Je travaille tous les jours sur des sujets qui me passionnent de par leur technicité, leur ambition et leur impact médical. Je fais partie des chanceux qui aiment leur travail ! La persévérance est un trait de caractère que j’ai depuis toute petite. Lorsque je rencontre une difficulté ou un refus, je me donne d’abord du temps pour digérer l’échec avant de commencer à le transformer naturellement en opportunité. Je regarde aussi en arrière pour apprécier le chemin parcouru et regagner l’énergie nécessaire à viser encore plus haut. Enfin, la vision est une nécessité pour mon poste. Il est important de pouvoir construire une vision autour d’une histoire simple pour ensuite la partager à l’ensemble des partie prenantes : les collaborateurs autour du projet, les partenaires, les investisseurs, les utilisateurs etc.
VOS DÉFIS PASSÉS, VOS RATÉS, VOS GRANDS MOMENTS DE SOLITUDE ?
Nous avons rencontré des difficultés pour la constitution de l’équipe, pour la validation technique (plus de 15 versions de prototypes sur 5 ans avant d’aboutir à un produit commercialisé) mais aussi pour le financement de notre activité. J’ai du mal à raconter un raté en particulier, peut-être parce qu’il y en a beaucoup trop ou peut-être parce que je préfère me remémorer uniquement des grandes victoires ! Avec du recul, ces échecs sont souvent à l’origine des décisions clés de l’histoire de la start-up.
VOS MEILLEURS MOMENTS, LES SUCCÈS DONT VOUS ÊTES FIÈRE ?
Voir la première validation de l’intérêt clinique de notre approche technologique puis l’impact médical sur les premiers patients. Ensuite, constater la visibilité croissante de notre technologie et notre dispositif. Enfin, avoir réussi à créer une équipe d’experts à la frontière de plusieurs aires techniques : optique, mécanique, industrialisation, informatique, intelligence artificielle.
DES PERSONNES QUI VOUS ONT AIDÉE/MARQUÉE OU AU CONTRAIRE RENDU LA VIE DIFFICILE ?
En rentrant dans le monde entrepreneurial, je pensais me retrouver seule face à toutes les difficultés d’une création de société. En pratique, j’ai rapidement rejoint une communauté d’entrepreneurs soucieuse de partager leurs expériences, notamment en intégrant un incubateur de start-ups. Il y a eu et il y aura toujours des grands moments de solitude. Mais je sais pouvoir compter sur un réseau proche et qualifié d’entrepreneurs disponibles pour me donner leur avis critique et m’apporter des premières réflexions actionnables.
VOS ENVIES ET DÉFIS À VENIR ?
Nous avons plusieurs défis à relever au sein de DAMAE Medical, comme le développement des outils d’aide au diagnostic basé sur de l’intelligence artificielle ou encore l’internationalisation de l’offre. Ce qui me stimule le plus est probablement la croissance de notre équipe qui permettra de porter plus loin l’ambition de révolutionner la prise en charge des cancers de la peau.
ET VOUS FAITES QUOI EN DEHORS DE VOTRE TRAVAIL ?
Voyager quand cela est possible. Passer du temps avec mes amis et ma famille.
VOS HÉROÏNES (HÉROS) DE FICTION, OU DANS L’HISTOIRE ?
Gisèle Halimi.
VOTRE DEVISE FAVORITE ?
Quand on veut, on peut et quand on peut, on doit.
UN LIVRE À EMPORTER SUR UNE ÎLE DÉSERTE ?
Le Seigneur des Anneaux de Tolkien.
UN MESSAGE OU UN CONSEIL AUX JEUNES FEMMES ?
Il n’y a jamais eu de meilleur moment pour vous lancer dans une aventure qui vous passionne.
Ne doutez pas et foncez !